PLAISIRS ET CHAGRINS D'AMOUR





PLAISIRS ET CHAGRINS D'AMOUR

 

 

À quatre-vingts ans je n'ai toujours pas le fin mot de cette histoire et c'est peut-être très bien car si on arrivait  à expliquer ce sentiment, à mettre par exemple l'amour en équation, ce serait effrayant. Tout le monde rêve à l'amour, passion tant de fois exaltée par les écrivains et les poètes, qui nous transporte au-dessus des souffrances de la vie ordinaire et parfois monotone. Combien de fois n'ai-je pas rêvé à cette âme sœur tant attendue ; comme le messie dont on dit qu'il va venir… Je sais, ma vision n'est pas très réjouissante, mais elle est à l'image de ce que j'ai vécu car j'ai passé mon enfance à idéaliser les gens et les choses, à rêver. J'étais celui que l'on appelait "jan de la lune" qui ne voyait pas toujours à temps les obstacles qui se trouvaient sur son chemin. 

Mais à quoi rêve-t-on ? Est-ce que cette âme sœur existe ailleurs que dans le rêve ? 

Après notre première rencontre avec l'amour, dans les bras de nos parents, comment allons-nous tisser des liens avec d'autres personnes en dehors de la famille ? Pourquoi certains réussissent-t-ils mieux que d'autres en amour ? 

Tout ce que j'ai compris ici m'a encore ramené à ce que je crois être le point central de notre existence : la perception que nous avons du monde n'est bien-sûr qu'une perception et non le réel. C'est une sensation, une illusion, un "ressenti" comme l'on dit des enfants qui prétendent que l'enseignant leur a mis une mauvaise note parce qu'il ne les aime pas. Il y a "les autres" et l'idée que nous nous faisons des autres. Nous sommes souvent les artisans de notre tristesse ou de notre joie du fait de ces illusions. Si j'avais su avant ce que j'ai compris aujourd'hui, j'aurais peut-être mieux profité de la vie et de ma jeunesse. 

J'ai donc, modestement, rassemblé ici mes observations comme un bric-à-brac, les unes à la suite des autres, souvent relayées par des chansons, des paroles de poètes, de philosophes ou d'artistes, en espérant que cela puisse servir à d'autres, pour les aider parfois à moins souffrir, à mieux vivre et pourquoi pas, les inciter à poursuivre la réflexion sur ce sujet inépuisable et passionnant.

 

Commencer sa vie avec un capital affectif

 

Être aimé de ses parents et en avoir conscience me semble être le capital nécessaire pour vivre l'amour et ne pas sombrer dans le désespoir quand survient la rupture. Il s'agit de ne pas vivre cette rupture comme un enfant qui a peur d'être abandonné, mais comme un adulte qui sait rebondir car, comme le chantait si bien la regrettée Réjane Perry : "On est toujours tout seul au monde" dans la chanson "Les uns contre les autres" de Luc Plamondon et Michel Berger


Les uns contre les autres


On dort les uns contre les autres

On vit les uns avec les autres

On se caresse, on se cajole

On se comprend, on se console

Mais au bout du compte

On se rend compte

Qu’on est toujours tout seul au monde

 

On danse les uns avec les autres

On court les uns après les autres

On se déteste, on se déchire

On se détruit, on se désire

Mais au bout du compte

On se rend compte

Qu’on est toujours tout seul au monde

 

On dort les uns contre les autres

On vit les uns avec les autres,

On se caresse, on se cajole

On se comprend, on se console

Mais au bout du compte

On se rend compte

Qu’on est toujours tout seul au monde

 

On danse les uns avec les autres

On court les uns après les autres

On se déteste, on se déchire

On se détruit, on se désire

Mais au bout du compte

On se rend compte

Qu’on est toujours tout seul au monde

 

Elle s'appelait Linda

Un soir des années 1980, dans la salle d'attente d'un kinésithérapeute à Paris, j'engageais la conversation avec une demoiselle qui attendait comme moi d'être reçue par ce praticien du "décoinçage" mais qui ne semblait pas coincée du tout. Il n'en fallut pas plus pour que notre échange débouche sur tout ce qu'il pouvait y avoir d'hilarant dans un cabinet médical au point qu'un autre patient qui nous dévisageait s'aventura à nous demander :"Vous avez fumé un pétard ?" Ce qui ne fit bien sûr qu'augmenter notre hilarité. La suite, on la devine, j'ai revu la demoiselle et un idylle s'en suivit dans une époque bohème de ma vie. De cette relation, je retiens avec intérêt cette remarque pleine du bon sens sépharade de Linda : "Si tu ne t'aimes pas toi-même, personne ne t'aimera". À méditer.


Dans le chapitre où l'on idéalise l'être aimé

Une chanson qui m'a toujours interpelé : "Je t'aime encore plus" de Mick Micheyl

 


 Je t'aime encore plus

 "Je t'aime encore plus quand tu n'es pas là

Non pas que je t'aime moins près de moi
Mais je t'aime encore plus quand tu n'es pas là
Car je peux rêver de toi…"

(Mick Micheyl -1956)  

Très souvent, en effet, je me suis surpris à rêver de l'autre au point de me poser la question "Est-ce que je l'aime comme elle est ?" Et la réponse est venue toute seule : je l'avais idéalisée. Il fallait que la réalité cadre avec le rêve et, bien-sûr, cela n'était pas possible. Cette autre était différente, avec des qualités et des défauts propres à sa personne. Et ce mécanisme générateur d'échecs s'est reproduit très souvent car, malgré son évidence, même si je pouvais le décrire, je n'en avais pas réellement conscience, il restait enfoui dans l'inconscient, jusqu'au jour où, enfin, après des années… 

 

Amour slovène

Mariutcha avait de beaux yeux, elle me faisait rêver, je l'idéalisais. Je lui dis que je l'aime et elle me répond "moi aussi je t'aime". Mais elle n'était pas comme je la voyais ; elle était changeante, parfois romantique ; parfois délirante et infidèle avec ce côté sauvage et passionné des filles de Mostar, Zagreb ou Dubrovnik. Un peu l'oiseau rebelle de Carmen. Et puis le temps passa et ma souffrance aussi (Merci Léo Ferré). Un soir, après une ultime rupture, elle sonna de nouveau à ma porte et je découvris une personne qui n'était plus celle que j'avais aimée pendant tant d'années. Je n'oserai même pas dire ici ce que je ressentis car ce serait indécent. Je découvris une personne ordinaire, toujours avec ses yeux bleus certes, mais c'était tout. Alors j'eu envie qu'elle parte et dans un sursaut de courtoisie j'inventais un motif banal pour sortir de chez moi et fuir dans la nuit parisienne avec un sentiment de liberté indéfinissable.

 

A la terrasse d'un café parisien 

La scène qui va suivre, bien que très réelle, reste pour moi inacceptable. Elle s'appelait Christiane et ce jour de juillet 1985, nous voulions prendre un café en terrasse dans le quartier Beaugrenelle à Paris. Arrivés devant la brasserie de notre choix, je sortis un mouchoir de ma poche pour essuyer la chaise (poussiéreuse) où Christiane allait s'asseoir car elle portait un pantalon blanc. Elle n'apprécia pas le geste et me fit cette remarque ahurissante : "Surtout ne fait jamais cela car je ne vais plus t'aimer". No comment.

 

Un jour Charles Baudelaire 

 


Cette même année 1965 nous étudions les œuvres de Charles Baudelaire qui avait écrit, entre autres mots "L'amour est comme une rose, chaque pétale, une illusion, chaque épine, une réalité". Nous voilà encore dans l'illusion ! Mais pourquoi les épines ne seraient-elles pas aussi une illusion ? Quand je m'évertuais à souffrir dans des relations compliquées, j'étais responsable de cette souffrance puisque je persistais à entretenir une telle relation ? 

 

Ne me quitte pas 

Malgré tous les conseils de ceux qui venaient me dire : "Pourquoi tu ne l'oublie pas, elle est partie, laisse tomber", je continuais d'espérer, recherchant tous les moyens pour reconquérir le cœur de ma bien-aimée, mais en vain. J'avais vingt ans. Une vieille dame me dit alors "si tu la suis, elle te fuit ; si tu la fuis, elle te suit". Mais cela ne peut fonctionner quand on est attaché à une personne ! Puis vinrent d'autres conseilleurs préconisant qu'il ne fallait jamais déclarer son amour, dicton repris par Françoise Dorin en 1965 dans sa chanson "N'avoue jamais" interprétée par Guy Mardel. Certes, il existe des gens qui se comportent comme des enfants capricieux jusque dans leurs relations sentimentales et qui désirent sans cesse ce qu'il n'ont pas au point de délaisser celui ou celle qui les aime pour aller chercher ailleurs. N'empêche que la rupture sentimentale est mal vécue par tout le monde et l'on ne sait jamais s'il est bon ou non de continuer d'espérer quand l'autre vous rejette. La question peut alors être posée sur la manière dont on vit cette rupture et d'éviter de la ressentir comme un enfant qu'on abandonne. En bref, il y a un moment où "il faut fermer le tiroir" et regarder les oiseaux. C'est ce qui s'est passé pour moi, miraculeusement, un jour d'été 1970 à la terrasse du Forum Plage à Nice devant un café glacé ! Je ne saurais pas expliquer comment, mais j'en avais assez de souffrir et mon esprit s'est envolé… avec une mouette ! 

Maurice Maeterlinck disait des fleurs que les plus belles étaient celles qui souffraient le plus. En philosophie on enseigne aux élèves qu'un homme complètement heureux n'aurait pas l'idée de faire de l'art car l'œuvre d'art est un cri : "Je voudrai" ! Et des œuvres d'art en amour il y en a beaucoup comme la chanson de Jacques Brel sur la rupture amoureuse, écrite et composée avec son pianiste Gérard Jouannest : "Ne me quitte pas", interprétée également je crois par Nina Simone et Gérard Lenormand. Nous ne pouvons pas passer à côté de cette chanson qui montre à quel point un être peut s'avilir et se rabaisser en refusant une rupture au point de devenir "l'ombre du chien" de la personne qui le quitte.

 



Ne me quitte pas

  

Ne me quitte pas

Il faut oublier

Tout peut s'oublier

Qui s'enfuit déjà

Oublier le temps

Des malentendus

Et le temps perdu

À savoir comment

Oublier ces heures

Qui tuaient parfois

À coups de pourquoi

Le cœur du bonheur

Ne me quitte pas…

 

Moi, je t'offrirai

Des perles de pluie

Venues de pays

Où il ne pleut pas

Je creuserai la terre

Jusqu'après ma mort

Pour couvrir ton corps

D'or et de lumière

Je ferai un domaine

Où l'amour sera roi

Où l'amour sera loi

Où tu seras reine

Ne me quitte pas…

 

Je t'inventerai

Des mots insensés

Que tu comprendras

Je te parlerai

De ces amants-là

Qui ont vu deux fois

Leurs cœurs s'embraser

Je te raconterai

L'histoire de ce roi

Mort de n'avoir pas

Pu te rencontrer

Ne me quitte pas…

 

On a vu souvent

Rejaillir le feu

De l'ancien volcan

Qu'on croyait trop vieux

Il est, paraît-il

Des terres brûlées

Donnant plus de blé

Qu'un meilleur avril

Et quand vient le soir

Pour qu'un ciel flamboie

Le rouge et le noir

Ne s'épousent-ils pas ?

Ne me quitte pas…

Ne me quitte pas

 

Je ne vais plus pleurer

Je ne vais plus parler

Je me cacherai là

À te regarder

Danser et sourire

Et à t'écouter

Chanter et puis rire

Laisse-moi devenir

L'ombre de ton ombre

L'ombre de ta main

L'ombre de ton chien

Mais

Ne me quitte pas…

 

Mai 1968 et Léo Ferré



 

Léo Ferré est arrivé au bon moment dans ma vie pour me montrer la futilité de l'importance que l'on peut donner à certains évènements de notre vie pour s'en apercevoir trop longtemps après. On fait son deuil de tout et "c'est pas la peine d'aller chercher plus loin, faut laisser faire et c'est très bien". 


Avec le temps


"Avec le temps, va, tout s'en va

On oublie le visage, et l'on oublie la voix

Le cœur, quand ça bat plus
C'est pas la peine d'aller chercher plus loin
Faut laisser faire, et c'est très bien..

L'autre qu'on adorait, qu'on cherchait sous la pluie
L'autre qu'on devinait au détour d'un regard
Entre les mots, entre les lignes et sous le fard
D'un serment maquillé qui s'en va faire sa nuit
Avec le temps, tout s'évanouit..

Même les plus chouettes souvenirs, ça, t'a une de ces gueules
À la galerie, j'farfouille dans les rayons d'la mort
Le samedi soir quand la tendresse s'en va toute seule

L'autre à qui l'on croyait pour un rhume, pour un rien
L'autre à qui l'on donnait du vent et des bijoux
Pour qui l'on eût vendu son âme pour quelques sous
Devant quoi, l'on s'traînait comme traînent les chiens
Avec le temps, va, tout va bien

On oublie les passions et l'on oublie les voix
Qui vous disaient tout bas les mots des pauvres gens
Ne rentre pas trop tard, surtout ne prends pas froid..

Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu
Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard
Et l'on se sent tout seul peut-être, mais peinard
Et l'on se sent floué par les années perdues
Alors vraiment
Avec le temps on n'aime plus.
 


Cette chanson, malgré ses mots glaçants, est souvent venu apaiser mes chagrins car elle décrit admirablement "l'autre qu'on adorait" et qu'on n'aime plus car le rouleau compresseur du temps a fait son œuvre. Ce temps dont on dit parfois "qu'une seconde est comme l'éternité", ce qui peut nous amener à considérer, dans ce monde d'illusion, que le chagrin de l'instant est déjà bien loin une seconde après et qu'on l'a oublié. 

 

J'ai rêvé New-York



J'ai rêvé New York


Puis, en 1974, perdu dans mes questionnements et cette sensation d'impuissance face au mystère de l'amour qui nous domine, j'écoutais Yves Simon chanter "J'ai rêvé New York"… où il y a cette phrase qui cite le poète Américain Grégory Corso, " La puissance c'est rester debout au coin d'une rue et n'attendre personne". 

 

L'amour est un oiseau rebelle



 

Dans mes années folles, j'ai souvent écouté "Carmen" l'opéra-comique de Georges Bizet, le fameux passage "L'amour est un oiseau rebelle" avec cette description saisissante de cet "enfant de bohème qui n'a jamais connu de loi" au point où nos grands-parents disaient souvent de l'amour "qu'on ne savait jamais où il allait se nicher". Témoin ces amants dont on ne comprend pas ce qu'ils font ensemble comme cette femme splendide amoureuse d'un clochard. Je ne me lasse pas d'écouter l'interprétation de "Habanera" par Elina Garanca dans une production exceptionnelle. 


Habanera


"L'amour est un oiseau rebelle

Que nul ne peut apprivoiser

Et c'est bien en vain qu'on l'appelle

S'il lui convient de refuser

Rien n'y fait menace ou prière

L'un parle bien l'autre se tait

Et c'est l'autre que je préfère

Il n'a rien dit mais il me plaît..

Et c'est bien en vain qu'on l'appelle

S'il lui convient de refuser

L'amour est enfant de bohême

Il n'a jamais, jamais connu de loi

Si tu ne m'aimes pas, je t'aime

Si je t'aime prends garde à toi…"

 

Plaisir et chagrin  

 



L'amour de Sylvie s'en est allé malgré la promesse d'être aussi constant que l'eau qui coule dans le ruisseau. Voilà une chose inconcevable quand on accorde de la valeur à une telle promesse où "amour rime avec toujours". Surtout quand ce sentiment relève du sacré quand on est religieux. Alors les croyants diront que le diable est passé par là et les autres, dans les pays de langue latine diront que nous ne sommes sûrs de rien. 

Sumi Jo, soprano Sud-Coréenne interprète merveilleusement cette chanson.

 


 Plaisir d'amour

 

 Plaisir d’amour ne dure qu’un moment

Chagrin d’amour dure toute la vie

Tu m’as quitté pour la belle Sylvie

Elle te quitte pour un autre amant

 

Plaisir d’amour ne dure qu’un moment

Chagrin d’amour dure toute la vie

 

Tant que cette eau coulera doucement

Vers ce ruisseau qui borde la prairie

"Je t’aimerai" te répétait Sylvie

L’eau coule encore, elle a changé pourtant

 

Plaisir d’amour ne dure qu’un moment

Chagrin d’amour dure toute la vie

  

On ne sait jamais

 

C'est l'histoire vraie d'un acteur Américain qui s'était déchaîné mettant toute son énergie pour sauver celle qu'il aimait et qui était atteinte d'un cancer. Après une longue lutte et l'efficacité de la médecine, elle fut guérie ! Miracle ! Quelle joie ! Les mois passèrent et elle reprit des forces pour enfin retrouver une vie normale. Mais au fil des mois elle se détacha de cet homme qui l'aimait. Il ne s'en doutait pas et un jour elle lui apprit qu'elle ne l'aimait plus et le quitta. C'est très abrupt je sais, mais dans la vie, on ne sait jamais, comme le dit la chanson de Harry Philips interprétée par Jean Gabin "Maintenant je sais".

 


Maintenant je sais 

"Quand j'étais gosse, haut comme trois pommes

J'parlais bien fort pour être un homme

J'disais, je sais, je sais, je sais, je sais…

 

..Ce que j'ai appris, ça tient en trois, quatre mots

Le jour où quelqu'un vous aime, il fait très beau

Je peux pas mieux dire, il fait très beau…

 

…Y a 60 coups qui ont sonné à l'horloge

J'suis encore à ma fenêtre, je regarde, et j'm'interroge

Maintenant je sais, je sais qu'on ne sait jamais

La vie, l'amour, l'argent, les amis et les roses

On ne sait jamais le bruit ni la couleur des choses

C'est tout ce que j'sais

Mais ça, j'le sais"

 

L'amour nous dit-on, est une composante essentielle de la vie. 

Dans les années 1980, en souvenir des conseils de mon professeur de philo, j'ai entrepris la lecture de livres saints et autres ouvrages dont les Quatre Évangiles, divers traités de Yoga par Swâmi Vivekananda et nombre de livres de Maurice Maeterlinck, Emerson, etc...Celui qui m'a le plus impressionné fut l'histoire secrète des religions d'Edouard Schuré dans ce fabuleux ouvrage sur "Les Grands Initiés" que furent Rama, Krishna, Hermès, Moïse, Orphée, Pythagore, Platon, Jésus. Chaque jour, je prenais mon métro à la station Brochant jusqu'à mon bureau rue d'Aguesseau avec un livre dans la poche. Un jour de l'année 1978 c'était "Les quatre Évangiles" que j'avais mis dans une poche intérieure de mon blouson, et l'anecdote qui va suivre habite toujours ma mémoire : M'étant battu contre des voleurs à la tire dans une rame du métro, je m'étais retrouvé face à un individu qui s'acharnait, sans succès, à me donner des coups de pieds dans la poitrine ; et pour cause, le livre en question était un véritable bouclier…qui me permit de tenir jusqu'à l'arrivée d'un vaillant vieillard qui fit fuir les voleurs à grands coups de sa cane d'handicapé. C'était un blessé de guerre ! Fermons la parenthèse. Le dimanche, j'arpentais les quais de la seine, discutant avec les bouquinistes, à la recherche des vieilles collections de la librairie Montorgueil et de temps en temps j'assistais à des conférences sur "le temps" salle Gaveau à Paris où mon esprit nageait dans ces pensées qui apportaient des réponses à nombre de mes questionnements. Même étant incroyant, je dois dire que certaines de ces lectures m'avaient touché et interpelé car elles avaient modifié ma perception du monde. Je découvrais une vie de paix qui rendait plus facile mes relations sociales, au point que j'en fus troublé car c'était irrationnel et incompatible avec mon esprit cartésien. Hélas, cet état n'a pas duré à cause de problèmes de santé. Mais la trace qu'il en reste me rend toujours attentif aux messages de paix et d'amour, comme celui de l'Angelus du 27 juin 2021 où le Pape François a délivré une catéchèse sur l’amour comme meilleure guérison possible aux maux de la vie, conseillant quelques moyens pour le trouver. Que nous soyons croyants ou non, Chrétien ou autre, ceci doit être entendu. Extrait :


Le Souverain pontife est revenu sur les deux situations les plus dramatiques de la vie : la mort et la maladie.

La plus grande maladie est le manque d'amour 

Dans l'exemple de la femme qui perdait son sang (Mc 5, 21-43), plus que sa santé, ce sont ses relations affectives qui étaient compromises : selon la mentalité de l'époque, elle était considérée comme impure, et donc marginalisée, ne pouvant avoir de relations stables, un époux, une famille et des relations sociales normales. Elle vivait seule, avec un cœur blessé. 

Et l’évêque de Rome d’affirmer : « Quel est la plus grande maladie de la vie ? Le cancer, la tuberculose, la pandémie ? Non, la plus grande maladie de la vie est le manque d'amour. Et la guérison qui compte le plus est celle de l’affectif. 

Nous aussi, combien de fois avons-nous recours à de mauvais remèdes pour assouvir notre manque d'amour ? a interrogé François, poursuivant : "Nous pensons que c'est le succès et l'argent qui nous rendent heureux, mais l'amour ne s'achète pas. Nous nous réfugions dans le virtuel, mais l'amour est concret. Nous ne nous acceptons pas tels que nous sommes et nous nous cachons derrière les artifices de l'apparence, mais l'amour n'est pas une apparence. Nous cherchons des solutions auprès de magiciens et de gourous, pour nous retrouver ensuite sans argent et sans paix, comme cette femme." 

"Ne pas s'arrêter devant les blessures et les erreurs du passé, mais aller au-delà des péchés et des préjugés. Ne pas s'arrêter aux apparences, aller jusqu’au cœur". 

"Regarde autour de toi : tu verras que de nombreuses personnes qui vivent à tes côtés se sentir blessées et seules, elles ont besoin d'être aimées. Parce que seul l'amour guérit la vie a conclu le Souverain pontife, exhortant avec insistance à ne surtout pas juger, car Dieu aime tout le monde".

 

le sexe dans la relation amoureuse 

Il semblerait que, sur le plan sexuel, nous soyons tous programmés pour être attirés physiquement par l'autre selon des mécanismes complexes propres à chacun de nous. Regardez le comportement du chat quand il est attiré par une chatte et essayez de comprendre avec vos pulsions d'humain qu'est-ce qu'elle peut bien avoir d'attirant ? C'est comme si, sur une autre planète, l'attirance sexuelle se portait uniquement sur les oreilles ! 

Comment se fait-il, dans un couple, que l'un des deux en arrive à dire à l'autre au bout d'un temps plus ou moins long de vie commune :"Je ne te désire plus sexuellement, tu ne m'attire plus" ? Ce qui aboutit souvent au divorce. Avec une enfance baignée de culture judéo-chrétienne j'ai toujours cru étant jeune, que l'amour entre deux personnes n'était pas lié à la sexualité. 

Combien de fois dans ma jeunesse, ai-je été délaissé avec ma rose à la main, quand l'autre préférait quelqu'un de moins sentimental qui la déshabillait dans sa voiture derrière le Cap d'Antibes ou la nuit sur les galets crasseux de la plage de Nice ! 

Même le chanteur américain James Brown, qui avait interprété en 1956 des morceaux comme "Please, please, please" (Bébé ne t'en va pas) ou "Prisoner of love" en 1960, ira sur le terrain du sexe en 1970 avec son morceau connu "Get Up (I Feel Like Being a) Sex Machine " dont les paroles ne laissent aucun doute sur l'importance qu'il donne à la sexualité.


 

 Get on up (Lève-toi)

Stay on the scene (Reste sur la scène..)

Like a sex machine (Comme quelqu'un de canon)

Then use your form (Ensuite remue ton corps.)..

You gotta have the feeling (Tu dois avoir des sensations),

And then shake your moneymaker (Et ensuite, remue ton gagne pain)

 

Il n'y a, semble-t-il, que dans des âges avancés, quand "le démon de midi" n'est plus au rendez-vous, que peut s'installer un amour désexualisé ; et je parle au conditionnel en pensant bien-sûr aux vers éternels de Rosemonde Gérard qui décrivent merveilleusement ce sentiment en 1890 dans son poème "Les vieux" rebaptisé "L'Éternelle Chanson" :

 


"Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,

Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,

Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille,

Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.

Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête,

Nous nous croirons encore de jeunes amoureux,

Et je te sourirai tout en branlant la tête,

Et nous ferons un couple adorable de vieux.

Nous nous regarderons, assis sous notre treille,

Avec de petits yeux attendris et brillants,

Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,

Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs.

 

Sur notre banc ami, tout verdâtre de mousse,

Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer,

Nous aurons une joie attendrie et très douce,

La phrase finissant toujours par un baiser.

Combien de fois jadis j'ai pu dire " Je t'aime " ?

Alors avec grand soin nous le recompterons.

Nous nous ressouviendrons de mille choses, même

De petits riens exquis dont nous radoterons.

Un rayon descendra, d'une caresse douce,

Parmi nos cheveux blancs, tout rose, se poser,

Quand sur notre vieux banc tout verdâtre de mousse,

Sur le banc d'autrefois nous reviendrons causer.

 

Et comme chaque jour je t'aime davantage,

Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain,

Qu'importeront alors les rides du visage ?

Mon amour se fera plus grave – et serein.

Songe que tous les jours des souvenirs s'entassent,

Mes souvenirs à moi seront aussi les tiens.

Ces communs souvenirs toujours plus nous enlacent

Et sans cesse entre nous tissent d'autres liens.

C'est vrai, nous serons vieux, très vieux, faiblis par l'âge,

Mais plus fort chaque jour je serrerai ta main

Car vois-tu chaque jour je t'aime davantage,

Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain.

 

Et de ce cher amour qui passe comme un rêve,

Je veux tout conserver dans le fond de mon cœur,

Retenir s'il se peut l'impression trop brève

Pour la resavourer plus tard avec lenteur.

J'enfouis tout ce qui vient de lui comme un avare,

Thésaurisant avec ardeur pour mes vieux jours ;

Je serai riche alors d'une richesse rare

J'aurai gardé tout l'or de mes jeunes amours !

Ainsi de ce passé de bonheur qui s'achève,

Ma mémoire parfois me rendra la douceur ;

Et de ce cher amour qui passe comme un rêve

J'aurai tout conservé dans le fond de mon cœur.

 

Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille,

Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs,

Au mois de mai, dans le jardin qui s'ensoleille,

Nous irons réchauffer nos vieux membres tremblants.

Comme le renouveau mettra nos cœurs en fête,

Nous nous croirons encore aux jours heureux d'antan,

Et je te sourirai tout en branlant la tête

Et tu me parleras d'amour en chevrotant.

Nous nous regarderons, assis sous notre treille,

Avec de petits yeux attendris et brillants,

Lorsque tu seras vieux et que je serai vieille

Lorsque mes cheveux blonds seront des cheveux blancs."


 


L'exemple de mes parents


 

Mon père et ma mère s’étaient rencontrés à Alger à l'âge de 13 ans au cours de violon en 1922 et restèrent ensuite fiancés pendant de nombreuses années avant de se marier en 1931. En ce temps-là, on ne fêtait jamais "Pâques avant les Rameaux". Je n'ai jamais remarqué le moindre fléchissement dans l'amour qui les unissait et les problèmes de santé qui avaient obligé mon père en 1927 à partir très loin pendant quatre ans dans un sanatorium n'avaient pas écorché une once de leurs sentiments. C'est, je crois, le plus bel exemple d'amour que je n'ai jamais vu et qui a résisté à tous les nombreux malheurs de la vie que notre famille a connus. Mes parents se sont aimés jusqu'à ce que la mort les sépare, quand mon père a quitté ce monde un matin pluvieux de mai 1983 dans un petit village à la frontière Suisse, quand le ciel s'est déchiré et que tout a vacillé dans nos têtes. Ils restent, pour moi, l'unique référence à l'amour dans un couple, que je garde en secret au fond de mon âme, loin des agitations de ces temps matérialistes.


***

 

 

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